Avant de quitter Bishkek, il nous faut acheter une nouvelle tente. En effet, celle que nous avons est trop petite pour nous permettre d’y dormir avec Flash en cas de grand froid, et elle n’est pas très résistante au vent. Après de longues heures de recherche, nous finissons par trouver la tente idéale, la Salewa Sierra Leone Pro III : trois saisons, trois places, assez légère pour partir en trek, étanche mais respirante, et résistante jusqu’à 100 km/h de vent. Nous pouvons maintenant quitter la ville sereins, prêts à affronter les montagnes kirghizes. Mais bien sûr avant tout, nous passons faire nos adieux au staff de la guesthouse « Ultimate Adventure ».
En quelques heures, nous arrivons au bord du lac Issyk-Kul, où nous nous installons assez tôt après avoir acheté du poisson fumé sur le bord de la route. La température du lac est assez agréable et nous nous autorisons notre première vraie baignade (et pas mal de longueurs de natation pour Flash!) depuis le début de notre voyage. Il faut dire que jusqu’à présent, l’eau à moins de 10°C ne nous avait pas trop inspirée!
Le jour suivant, nous passons par Karakol avant d’attaquer une des pistes réputée pour être l’une des plus difficiles du pays : celle qui mène à Altyn-Arashan. Il nous faudra plus de trois heures pour parcourir les 15 km qui nous séparent de cette vallée. Trois heures à franchir des blocs de pierre assez impressionnants et des montées et descentes en dévers… Mais encore une fois, le 80′ nous surprend par son agilité et son aisance sur tous les terrains, et nous arrivons sans encombre.
A présent, il est l’heure de trouver l’emplacement parfait pour bivouaquer. Je n’ai pas le temps de dire « Non, pas là!! », que Fab’ vient de poser la voiture dans un profond bourbier. Quelques essais infructueux avec les MaxTrax, et deux enfants qui nous observaient du haut de leur cheval nous proposent d’appeler leur père pour qu’il nous sorte de là avec son petit 4×4 UAZ. Il est déjà tard et nous n’avons pas envie d’y passer la nuit donc nous acceptons leur proposition. A voir la difficulté avec laquelle l’homme démarre sa voiture, ce n’est pas gagné ! Finalement, quelques coups de manivelle et elle démarre en crachant une belle fumée blanche et bleue (on ne lui donne plus très longtemps à tenir!), et après quelques tentatives, nous voilà sortis de notre bourbier. Une courte discussion plus tard, rendez-vous est pris le lendemain pour leur emprunter deux chevaux afin de se balader dans la vallée.
Très contents (enfin surtout moi !), nous nous présentons chez eux le lendemain matin. Ils sellent les chevaux et nous tendent les rênes. Pas de caution, pas de guide, la simplicité même ! C’est parti pour trois heures de balade, seuls au bord de la rivière, au milieu des troupeaux de vaches et de chevaux. C’est un peu dur pour Flash au début, il aboie sur les chevaux, leur passe entre les jambes, mais après quelques minutes, il s’habitue et court à côté d’eux. Un vrai sentiment de liberté s’empare de nous et nous faisons galoper nos chevaux dans cette magnifique vallée.
Au programme de l’après-midi : glandouille au soleil, préparation des sacs pour le trek de demain, et réparation du pneu crevé par un clou quelques jours auparavant (jusqu’à présent le pneu ne se dégonflait pas mais nous préférons tout de même anticiper et le réparer). Nous allons nous coucher tôt car demain, une grosse journée de marche nous attend.
Nous partons à 8h pour le lac Ala-Kul, perché à 3500 m d’altitude. 20 km de marche, 1500 m de dénivelé positif et 400 m de négatif, après 3 mois passés dans la voiture sans réelle activité physique, nos jambes risquent de souffrir !
Les 15 premiers kilomètres sont faciles, mais dans les 5 derniers, la pente devient de plus en plus raide et la fatigue commence à se faire sentir dans les mollets. Peu importe, la vue qui nous attend au col, à 3900 m, vaut largement tous ces efforts.
Nous restons de longues minutes à contempler cet étonnant lac de couleur turquoise caché entre plusieurs sommets de 4000 m, avant de descendre dans le pierrier pour camper au bord. Après neuf heures de marche, nous sommes bien contents de nous arrêter et de tremper nos pieds dans l’eau glaciale.
Flash nous inquiète car il se met soudainement à trembler de tout son corps. Bien que fatigué, il avait l’air encore en forme à 3900 m, cela doit donc être la fatigue, et non pas le mal des montagnes, d’autant plus qu’après toutes ces nuits au-dessus de 2000 m, nous sommes assez bien acclimatés. À 20h nous sommes couchés et ne tardons pas à nous endormir, jusqu’à ce que la pluie nous réveille. Nous nous rendormons en espérant qu’elle ne dure pas. Malheureusement au réveil, le temps est toujours aussi mauvais. Entre Flash qui tremble toujours et la météo, la décision de lever le camp et redescendre est vite prise.
Pour cela, il nous faut rejoindre le chemin. Hier nous étions descendus dans le pierrier et il n’est pas question de prendre le même chemin pour remonter ! Nous longeons donc la rive jusqu’à ce que de gros rochers nous barrent la route. Impossible de passer par là avec Flash… Par chance, il y a des barques non loin de là, c’est donc à la rame que nous poursuivons notre route. C’est la première fois que Flash prend le bateau et on voit bien qu’il n’en mène pas large ! Une fois la barque déposée sur la berge, nous commençons notre remontée vers le col. Allez, c’est raide mais il n’y a que 400 m de dénivelé à gravir avant d’atteindre le col, après ce sera plus facile, et le soleil commence à se montrer.
Il nous faudra quand même six heures pour retrouver la vallée d’Altyn-Arasah et le 80′, qui nous attend bien sagement dans son pré. Cet après-midi, un repos bien mérité nous attend. Malheureusement, le soleil laisse vite place à la pluie et nous nous réfugions dans la tente de toit.
À notre réveil, il pleut toujours autant, nous décidons de quitter cette vallée et d’aller chercher le soleil ailleurs, mais c’était sans compter sur la boue : la voiture se met à glisser au moindre dévers. Vu la piste qui nous attend, ce ne serait pas très raisonnable de s’y essayer, même si quelques locaux l’empruntent par tous les temps. Leurs voitures sont bien plus légères que la nôtre et ils savent exactement où passer pour éviter le danger. Nous prenons alors une chambre dans une guesthouse le temps que la pluie s’arrête et que la piste sèche un peu.
Le gérant, un homme très souriant, nous invite à déjeuner et nous sert un plat de mouflon avec légumes et riz. C’est assez caoutchouteux mais longuement mijoté, ce n’est pas si mauvais. Dans l’après-midi, un couple d’Autrichiens nous aborde pour nous demander s’ils sont bien arrivés à Altyn-Arashan. Nous sympathisons immédiatement et passons de longues heures à discuter avec eux dans la chambre que nous partageons.
Ici, chaque guesthouse a ses propres sources d’eau chaude, nous passons donc un bout de la soirée à nous relaxer dans l’eau avec quelques bières bien fraîches.
Le lendemain, le soleil est de retour, nous laissons la piste sécher encore quelques heures et prenons le départ. Elle est encore un peu glissante par endroits mais rien à voir avec hier. Elle nous semble même moins difficile qu’à l’aller ! Visiblement, nous nous sommes habitués aux dévers et au « rock crawling ». Natascha et Stephan descendent à pied, nous les croisons plusieurs fois sur le chemin.
De retour à Karakol après trois heures de descente, nous nous ruons au « Fat Cat » pour y dévorer une pizza. Non pas que nous ne trouvions rien d’autre de bon à manger dans cette ville, au contraire, mais manger une pizza maison tout en soutenant l’initiative de cet établissement nous a paru être une bonne idée. En effet, les propriétaires soutiennent plusieurs actions de développement local et l’accès à l’éducation des enfants, mais ils sont aussi à l’origine de centres d’accueil pour les jeunes filles qui ont fui leur famille pour échapper à un mariage forcé. Même si cette tradition se perd, cela est encore assez courant par ici. Alors quoi de mieux que de participer à ces bonnes actions tout en déjeunant dans un cadre très sympa!
Repus, nous partons faire nager Flash dans le lac, puis visiter une mosquée très atypique, puisque de loin, on dirait un temple bouddhiste. Mais rien de surprenant à ca : cette dernière a été érigée par des Chinois musulmans qui ont dû fuir leur pays pour pouvoir continuer à pratiquer leur religion librement.
Il est à présent « Beer o’clock », et nous rejoignons Natascha et Stephan, nos amis viennois, dans un genre de Biergarten local. Encore une fois, nous passons une excellente soirée en leur compagnie puis les laissons, à regret, partir pour le Kazakhstan.
Pour nous, la suite se fera encore une fois sous la pluie. Une accalmie nous permet cependant d’aller admirer les « Seven Bulls », ces formations de roche rouge assez surprenantes.
L’accalmie ayant été de courte durée, nous continuons notre route en direction de Kochkor, où nous atterrissons au « Happy Hostel », une guesthouse tenue par une famille des plus sympathiques qui essayera tant bien que mal de nous apprendre quelques mots de Kirghize.
Nous avons de la chance : dès la lendemain le soleil fait son grand retour, ce qui nous permet de nous balader en ville et retrouver des Francais rencontrés la veille autour d’un café. Sur notre chemin, un homme nous interpelle et nous demande combien coûte Flash… Nous avons bien du mal à lui expliquer qu’il n’est pas à vendre!
De retour à la guesthouse, nous travaillons sur la voiture (resserrage des fixations du réservoir auxiliaire) en attendant l’heure de la finale de la Coupe du Monde. L’heure venue, nous nous rendons au Retro Café et tombons par hasard sur des Hauts-Savoyards (le monde est petit !) avec qui nous passons une soirée riche en fous-rires pendant laquelle nous évoquons nos souvenirs de 1998 en regardant le match. La France l’emporte sur la Croatie, ce qui ne gâche rien à la soirée ! Les rues sont beaucoup plus calme ici qu’en France, nous rentrons donc nous coucher sous le regard bienveillant de Lénine.. Nous sommes Champions du Monde !
Aujourd’hui, nous quittons Kochkor pour continuer notre découverte des lacs et montagnes kirghizes.
_Laure
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